
François Quesnay au contemporain : la liquidité est pour les libéraux ce que la circulation sanguine est pour les urgentistes.
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19 août 2025
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Publié par

Alexis Vessat
Ph.D in Energy Economics (CREDEN – Univ. Montpellier), mentored by Pr. Jacques Percebois. Worked alongside experts from CentraleSupélec – Paris-Saclay and the World Bank.
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Depuis les écrits de François Quesnay, économiste du XVIIIe siècle, la liquidité est perçue comme une condition sine qua non de la croissance économique et de la prospérité collective.
Dans ses Tableaux économiques, Quesnay en fait un élément central de son modèle de circulation de la richesse, où la fluidité des échanges et des capitaux est essentielle à la santé du système économique. Selon lui, une liquidité suffisante permet de favoriser les échanges, de fluidifier le commerce et d’assurer la constance des flux financiers qui soutiennent l'activité économique.
Dans cette perspective, l'absence de liquidité apparaît immédiatement comme un frein à l'expansion économique, comparable à une obstruction dans un organisme vivant.
L'analogie entre la liquidité et la circulation sanguine n'est donc pas anodine. Tout comme un médecin de garde scrute avec attention l’état circulatoire du patient pour prévenir tout risque de défaillance vitale, les économistes libéraux suivent de près les mécanismes de liquidité pour éviter toute forme de stagnation ou d’asphyxie économique. Ils considèrent la liquidité non seulement comme une nécessité, mais aussi comme la garantie de l’efficacité d’un marché libre. Si l'argent, tel le sang dans le corps, ne circule pas correctement, l’ensemble du système peut se trouver menacé.
Le lien entre liquidité et efficacité du marché est d’autant plus significatif qu’il repose sur l’idée que la libre circulation des capitaux est le moteur de l’innovation et de la concurrence.
Un marché liquide est un marché où les investisseurs sont incités à intervenir rapidement, où l’information circule librement et où les prix se forment de manière transparente. Cette dynamique, aux yeux des économistes libéraux, est le fondement d’un système économique optimal.
Cependant, cette obsession de la liquidité soulève également des questions sur ses limites.
À l'instar d’un excès de fluidité sanguine, qui peut provoquer des troubles, une recherche excessive de liquidité peut engendrer une volatilité excessive, alimenter des crises financières ou nourrir des bulles spéculatives. Le véritable défi réside dans l’équilibre délicat entre une liquidité suffisante pour garantir une économie fonctionnelle et l'excès de liquidité qui pourrait engendrer une instabilité néfaste. Dans la doctrine libérale, cette quête incessante de la liquidité parfaite demeure cependant un pilier fondamental sur lequel repose toute la dynamique économique.
Ce principe trouve un écho particulier dans le domaine de la régulation des marchés de l’énergie, où la Commission de régulation de l’énergie (CRE), dans ses récentes déclarations, a qualifié la liquidité de moyen terme comme « assez encourageante » à N+4, tout en affichant « bon espoir » pour N+5.
Toutefois, cette appréciation soulève plusieurs interrogations. Le terme « encourageant » est-il véritablement satisfaisant ? Peut-on considérer ce constat comme une confirmation de la stabilité à long terme, ou n’est-il qu’une reconnaissance de la fragilité sous-jacente du marché ? Quels sont les éléments concrets permettant de croire que cette liquidité de moyen terme va se consolider, et dans quelles conditions ?
Cette question rejoint les préoccupations soulevées par la transition du système de l'Arenh vers un mécanisme de marché complet, dans le cadre de l’accord entre l’État et EDF.
Bien que jugée positive par la CRE, cette évolution reste marquée par une certaine prudence.
Le défi réside dans la capacité à maintenir un équilibre entre l’objectif de liquidité et les risques d’instabilité associés à une recherche excessive de fluidité.
Cette dynamique invite à s’interroger sur la véritable suffisance de la liquidité actuelle pour garantir un marché énergétique stable et efficace à long terme.
L’argument selon lequel la liquidité est perçue comme une obsession des libéraux, tout comme la circulation sanguine l’est pour les urgentistes, s'inscrit parfaitement dans le contexte de la régulation des marchés de l’énergie, où la gestion de la liquidité est effectivement perçue comme centrale pour garantir la stabilité et le bon fonctionnement du système.
Ce parallèle, qui assimile la liquidité à une condition vitale, suggère que, tout comme un problème de circulation sanguine peut entraîner des défaillances physiques graves, un manque de liquidité peut déstabiliser un marché, le rendant vulnérable aux crises et à l'inefficacité.
Cependant, cette obsession pour la liquidité soulève aussi des interrogations quant à sa réelle efficacité, à sa véritable capacité à garantir une régulation optimale et à sa suffisance pour assurer une stabilité durable.
Dans le cadre de la régulation des marchés de l’énergie, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) a récemment qualifié la liquidité de moyen terme de « assez encourageante » à N+4, et a exprimé de « bons espoirs » pour N+5. Ces termes, bien que positifs, ouvrent néanmoins la porte à des doutes et des interrogations. « Assez encourageant » semble une qualification prudente, nuancée, voire teintée d’incertitude, suggérant que, bien que la situation ne soit pas alarmante, elle n'atteint pas encore un stade où la liquidité peut être considérée comme pleinement satisfaisante. La question essentielle est alors de savoir si cette liquidité, même jugée encourageante, est suffisante pour assurer un marché fonctionnel et stable à long terme. Un marché liquide doit-il simplement être perçu comme fonctionnant de manière acceptable à court terme, ou doit-il garantir une stabilité plus profonde et durable ?
La liquidité, dans la pensée économique libérale, dépasse largement la simple notion technique : elle constitue un principe fondamental de régulation du marché, presque une obsession métaphysique, qui en fait l'un des leviers essentiels du bon fonctionnement de l'économie.
Finis rerum.
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Bibliographie
Quesnay, F., 1758. Tableau économique. Paris: Imprimerie Royale.
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